Sujet de thèse : Intrication en optique quantique électronique: perspectives pour les senseurs quantiques basés sur les courants électriques quantiques.
Directeur de recherches : Pascal Degiovanni (DR1 CNRS).
Unité de recherche : Laboratoire de Physique de l'ENS de Lyon (UMR 5672).
Résumé du sujet : Ces dernières années ont vu l’émergence d’un nouveau champ de recherche qui vise à étudier le transport électronique quantique sous sa forme ultime, c’est à dire en manipulant une à quelques excitations électroniques cohérentes dans un conducteur quantique [1,2,3]. Une décennie de travaux a abouti à démontrer notre capacité non seulement à émettre [4] mais également à caractériser finement les excitations électroniques individuelles dans certains conducteurs quantiques, dont les canaux de bord de l’effet Hall quantique entier [4,5] qui constituent un analogue des fibres optiques en optique quantique photonique.
Les travaux récents effectués dans le cadre du projet européen SEQUOIA [6] et de l’ANR QuSig4QuSense ont permis d’explorer le potentiel de l’optique quantique électronique pour la détection et la mesure de champs électromagnétiques quantiques sur des échelles de temps ultra-courtes tels qu’un rayonnement présentant par moment des fluctuations plus faibles que celles du vide quantique (état comprimé) [7]
Le système phare étudié est duale de celle du radar et du lidar qui sondent les propriétés d’une cible matérielle au moyen d’ondes électromagnétiques: dans le radar électronique, un interféromètre électronique est utilisé pour sonder un champ électromagnétique. L’existence des sources d’électrons uniques permet de disposer de courants électriques quantiques sondes qui exercent une très faible rétro-action quantique sur le champ électromagnétique sondé. De plus, les techniques de contrôle des sources d’électrons uniquement permettent d’envisager sonder le champ aussi bien sur des durées très courtes que de manière résolue en fréquence, voire de manière combinée.
Si les travaux menés récemment ont permis d’établir un cadre général permettant de prédire le signal observé par un tel radar électronique [8], plusieurs questions importantes restent encore ouvertes qui constituent le présent sujet de thèse:
1) la caractérisation du rapport signal/bruit d’un tel dispositif reste à faire ce qui permettra ensuite d’aborder le problème de l’optimisation de la source d’électrons uniques afin de maximiser ce dernier, un problème classique en théorie de la métrologie quantique mais inexploré dans le contexte de l’optique quantique électronique.
2) l’analyse des signaux attendus dans le cas où le champ électromagnétique est celui rayonné par une excitation électronique unique reste à faire. Ce cas est très important dans l’optique de la réalisation d’un détecteur d’électrons uniques « en un coup » (one-shot) [9] et nécessite d’étudier en détail la collision entre deux électrons uniques se propageant dans deux canaux de bords chiraux capacitivement couplés dans une région de longueur finie.
3) alors que dans le cas des interféromètres optiques, le gain apporté par l’utilisation d’états intriqués impliquants plusieurs photons a été caractérisé depuis longtemps, la situation n’est pas aussi claire dans le cas électronique. Il s’agira donc d’explorer le potentiel d’états intriqués à deux électrons pour le radar électronique.
Une partie du travail pour les volets (2) et (3) consistera de clarifier la notion d’intrication en optique quantique électronique et à quantifier celle ci à partir de quantités mesurées expérimentalement (comme le bruit en courant ou, de manière équivalente, les cohérences électroniques d’ordre deux).
Contexte du projet et collaborations prévues:
Ce projet de recherche s’inscrit dans le cadre du projet de recherche QuSig4QuSense financé par l’ANR et qui implique, outre le groupe Lyonnais, le groupe expérimental de Gwendal Fève à l’ENS (Paris) ainsi qu’Inès Safi (Laboratoire de Physique des Solides à Orsay). Le lien avec l’expérience fera l’objet d’une attention particulière. Dans cette perspective, des échanges réguliers sont prévus avec le groupe de G. Fève.
La partie (2) du présent projet s’inscrit aussi dans le projet e-qubit-fly financé par l’ANR dans le cadre de l’appel «Calcul quantique au vol » du Plan Quantique lancé en novembre 2021. Le projet e-qubit-fly regroupe les principaux groupes français impliqués dans le développement de l’optique quantique électronique.
Références:
1. E. Bocquillon et al, Annalen des Physik (Berlin) 526, 1 (2014).
2. A. Marguerite et al, Physica Status Solidi B 254, (2017).
3. C. Bauerle et al, Rep. Prog. Phys. 81, 056503 (2018).
4. A. Marguerite et al., Nature Communications 10, 3379 (2019).
5. B. Roussel et al, Phys. Rev. X Quantum 2, 020314 (2021).
6. «Single-electron wave packets for quantum metrology: concepts, implementations, and applications », technical report of the SEQUOIA EMPIR Project (doi:10.7795/EMPIR.17FUN04.RE.20220228)
7. H. Bartolomei et al, « Observation of edge magnetoplasmon squeezing in a quantum Hall conductor », preprint ArXiv:2201.04279.
8. H. Souquet-Basiège et al, « Quantum Sensing of time dependent electromagnetic fields with single electron excitations » (in preparation, 2022).
9. D.C. Glattli et al, « Design of a Single-Shot Electron detector with sub-electron sensitivity for electron flying qubit operation », preprint arXiv:2002.03947.